Kofs

Nom de naissance

Foued Nabba

Naissance

Marseille, Bouches-du-Rhône, France

Biographie

Foued Nabba, alias Kofs, naît en 1990 et grandit à Marseille entouré de ses parents, originaires d’Algérie, ainsi que de ses frères. Lui qui n’était pas forcément hermétique à la culture pop qu’il découvrait quotidiennement à la télévision, se passionne finalement pour le rap, dans lequel il reconnaît davantage son quotidien. Ses frères l’initient via une écoute intensive de pointures telles que IAM, Salif ou encore Alibi Montana, et bientôt, le jeune homme couche ses premiers textes et se passionne pour l’art de la rime. C’est via internet qu’il diffuse dans un premier temps ses sons et à 16 ans, un producteur est fasciné par sa voix rauque et lui offre la possibilité de travailler en studio. Avec des premiers titres forts, comme « Paradis », « Maître Cohen » ou encore « Genèse », accompagnés de vidéos percutantes, il fédère un public de plus en plus large et finit par signer avec Universal. S’il découvre aussi en parallèle le cinéma, s’infiltrant dans le casting de plusieurs projets dont le polar Chouf présenté à Cannes en 2015, il s’impose définitivement dans la sphère musicale avec la sortie en 2018 de son premier album, intitulé V, sur lequel s’invite notamment le rappeur SCH sur le titre « Caractère ». Un an plus tard, il est à nouveau sous les feux de la rampe à la faveur du single « Tout s’achète », enregistré cette fois-ci avec Alonzo.

Le rap est une musique puissante et chargée en émotions. Kofs est le genre d’artiste capable de débouler avec la puissance d’un char d’assaut, mais sans oublier d’exprimer des sentiments qui vont au-delà de la simple démonstration de force. 

L’enfance de Kofs est tristement banale : des parents venus en France depuis leur Algérie natale, une fratrie de cinq enfants qui grandissent à Marseille, cité Air Bel. Foued Nabba naît en 1990 et se passionne très jeune pour la musique. Il assimile la pop qui déferle à la télé et découvre le rap via ses grands frères, bousillés aux sons de Salif, IAM ou Alibi Montana. « Quand j’écoutais “Marie” de Johnny, j’aimais les sonorités mais je ne comprenais pas forcément. Par contre les rappeurs, eux, parlaient de ce qu’ils vivaient, et nous à Marseille on vivait la même chose. C’est ça qui m’a plu, je me suis reconnu dans leurs paroles. »

Très vite et très jeune, Kofs se lance dans l’art de la rime, avec des crews éphémères. Rien de sérieux pour ses collègues, mais lui comprend vite que c’est avec sa plume qu’il va s’imposer. Son inspiration ? Sa propre vie, cabossée et sur la marge. « Ma voix est cramée, je ne peux pas faire autrement. J’écoute tout ce qui se fait, mais je m’inspire de mon vécu. Ce que je raconte, ça n’est pas le pire. Je ne dis pas tout. Mais tout ce dont je parle, c’est du réel. » Aussi réel que son blaze, Kofs, résumé des noms de ses amis des années galère, Khaled, Omar, lui-même Foued et Sofiane.

Les premiers enregistrements de Kofs se retrouvent vite sur le net, mais les choses deviennent sérieuses quand il rencontre Maurice, un producteur qui a son propre studio et va lui donner sa chance. « J’ai croisé Maurice une première fois quand j’avais 16 ans, je lui avais fait écouter une maquette avec plein de titres de moi et d’autres collègues et il a dit “Le mec à la voix rauque, il peut faire quelque chose.” Dix ans après, je suis retourné dans son bureau et je lui ai dit que je savais ce que je voulais faire. Il m’a présenté à Comm qui est devenu mon manager, ça a commencé. »

Et ça commence fort avec une série de “chapitres”, des titres surpuissants où Kofs révèle une personnalité à l’épreuve des balles. “Paradis”, “Maître Cohen” et “Genèse”, accompagnés de vidéos soignées et percutantes, font passer Kofs au stade supérieur. « Comm m’avait dit “On fait trois clips et au troisième, on signe.” Ça faisait 15 ans que je rappais et je n’y croyais pas mais je l’ai fait, parce que j’aimais ça. Après “Genèse”, les maisons de disques ont tapé à la porte. Grâce à ce grain, cette image sombre que je transmettais. Ils ont vu que je n’avais pas de limites, pas de frein, c’est ce qu’ils ont kiffé. Ça paraît simple dit comme ça, mais c’était énormément de travail. » Une fois le deal verrouillé avec Universal, Kofs se lance dans la conception de son premier album. La signature ne change pas la composition de son équipe : Maurice et Comm pour le biz et l’image, Lars-N l’ingé son du studio MAP et 6Lexx Beatz pour les prods.

Le but de Kofs : raconter une histoire, comme un scénario rapologique qui irait encore plus loin que ses désormais fameux chapitres. N’hésitant pas à surprendre son public, Kofs décide d’incorporer dans son hardcore des refrains chantés. « Ça m’a demandé beaucoup de taf. Avec l’autotune, tout le monde sait chanter mais si tu n’as pas la vibe, rien ne te donnera le flow. » Le duo de beatmakers 6Lexx Beatz se taille la part du lion dans les sons de “V”, le titre d’album qu’a choisi Kofs. « Je parle de vrai, de vécu, de violence, de vengeance, de vie… Je voulais un titre qui définisse ce projet, et “V” évoque tout ça. » 

En parallèle à sa carrière d’artiste rap, Kofs infiltre aussi le milieu du cinéma. Une rencontre avec le réalisateur Karim Dridi convainc ce dernier de lui donner un rôle important dans son polar Chouf, présenté en 2015 au Festival de Cannes. D’autres rôles suivent (Paul Sanchez Est Revenu de Patricia Mazuy, La Nuit Je Mens de Stéphane Batut) mais pour l’heure, ce qui compte, c’est “V”, disque qui entend bien frapper les esprits et faire bouger les têtes. En 14 titres, Kofs parcourt le spectre des émotions et trimballe l’auditeur dans un voyage au cœur de l’enfer, dans un univers où les histoires de gangsters finissent mal, où l’urgence pousse aux pires extrémités mais où subsiste malgré tout une lueur d’espoir. De “Violence”, le titre événement de l’album, jusqu’au brutal “Koschtowski” en passant par l’intrigant “Elena” et son texte à double sens, Kofs impose sa personnalité à grands coups de punchlines rauques et de beats sauvages. Et n’hésite pas à se livrer, évoquant notamment ce père parti trop vite dans l’émouvant “Je Saigne”.

Un seul featuring sur “V”, mais quel feat : SCH rafale sur “La Moisson”, un duo organique né de la rencontre des deux MCs. « SCH connaissait Comm, il l’a contacté et le S est venu me voir dans mon quartier. On a discuté, j’ai vu qu’on avait la même mentalité et on a décidé de faire un morceau. On l’a écrit ensemble, on a tout fait ensemble. C’est un vrai titre, tu l’entends dans le son. Il y a des croisés, c’est pas chacun son couplet, c’est pas un feat internet, c’est humain ».

« C’est bien beau d’y arriver mais le plus dur c’est d’y rester », disait Le Rat Luciano. « C’est sûr qu’on va y arriver, et on va tout faire pour y rester », complète Kofs. Une affirmation qui prend racine dans la force de ce premier album, signé à la pointe du micro par un “V” qui deviendra Victoire. 

Olivier Cachin



“V”, L’ALBUM TITRE PAR TITRE

“La Pomme”
Produite par Punisher, cette introduction pose les bases d’un disque dur. « Le plus grand péché que j’ai commis cette année, c’est mon album », affirme Kofs. Le titre quant à lui, fait bien évidemment allusion à son secteur à Marseille, “La Pomme”.
Le flow est là, la référence à Marseille, et enfin la brutalité des sons : l’album peut commencer. 

“T’En Fais Pas”
Dans “V”, “T’En Fais Pas” est le premier refrain chanté à l’autotune. « Dans ce titre, je parle de ma vie, de mon histoire et de la mort de mon père, qui avait le cancer. J’avais 18 ans quand il est parti, je n’ai pas profité de lui comme mes grands frères. On ressent ce manque dans mon écriture. » Les mots de Kofs sont brutaux comme le son de 6Lexx Beatz : « Si je t’aime, j’hésiterai pas à tirer pour toi, mais un jour tu vas sûrement me trahir, je vais faire un sourire et je vais tirer sur toi. »

“Mon ombre”
La prod est signée OG Céleste, et le propos est sombre : « J’aime trop mon quartier mais je veux le quitter. » « Je voulais parler de trahison. C’est souvent comme ça dans une équipe, on a tous connu ça. En termes de sonorités, je voulais être en mode cool, pas triste. Certains disent que les gens changent quand ils réussissent mais ce qui change réellement, c’est l’entourage. J’ai quand même des amis sûrs, mais c’est comme ça. »

“Koschtowski”
« Si tu savais qui on était, avant de parler tu te pisserais dessus. » Kofs déboule en mode paro : « Même pas confiance en mon ombre. » « Je voulais un son puissant, et ce morceau a sa place dans l’album. On a grandi avec cette famille russe, avec mes amis les frères jumeaux Nico et Stéphane dont je parle dans le titre. » Phrase clé : « J’ai plus d’ennemis que de remixes de “Bella Ciao” ». Le rap est un sport de combat, et sur une prod de 6Lexx Beatz, Kofs enfile les gants. 

“Disparus”
« Je vais t’apprendre la rue. » Dès le démarrage, la leçon de Kofs est sans état d’âme. « Je ramène ce côté de la rue dont tout le monde ne parle pas. Là, je dis ce que j’en pense réellement. Entre nous on s’encule, on se jalouse à mort. En écrivant le texte, je suis parti sur une histoire qui aurait pu être la mienne, celle d’un mec qui se croit bien entouré, qui monte sur un coup et ça se passe mal. Et au parloir, les amis ont disparu. » L’urgence du flow se cale sur le beat fracturé de 6Lexx Beatz. 

“12C4” Prod by WOREK et MOODY SCRAG
C’est la suite du précédent morceau. Tu as fait ton coup, tu étais avec tous tes collègues, et quand tu es en prison tu demandes à ta femme de t’attendre. J’ai fait le tour des parloirs et malheureusement on voit qu’il y a 99 % de meufs pour les visites. » L’émotion imbibe ce titre crépusculaire, gris comme une cellule mal éclairée. « Avec les trois 8, personne n’est devenu riche. » Le refrain apporte malgré tout un peu de lumière. 

“Elena”
L’itinéraire d’une femme venue de l’Est qui, au fil des rimes, s’avère être aussi une arme. Avec son phrasé nostalgique, cette chanson détone et étonne. « Elle nous fascine mais on la hait tellement. On la kiffe tous mais on est tous dégouté d’elle. On t’aime, mais retourne en Russie. C’est un morceau plus imagé, quand je l’ai écrit je pensais vraiment à l’arme. J’ai ajusté mon texte pour qu’on puisse croire qu’il s’agit d’une femme ». Encore un beat siglé 6Lexx. 

“Violence” 
Sûrement le titre le plus fort, l’épicentre de l’album. Pas de tromperie sur la marchandise : la prod de 6Lexx Beatz bastonne et le flow abrasif de Kofs se met à l’unisson de la rythmique déglinguée. Un humour noir imprègne ce rap d’exception. « Les petits frères font midi/minuit mais la juge appelle ça de l’argent facile. » La violence est verbale, le débit tendu, les histoires noires.
« C’est un rappel à l’ordre. C’est pour choquer. Si tu touches à la famille, j’adore la violence. “Violence”, c’est une gangster story. » Un rap ? Mieux : un hymne qui sera saigné dans les grosses voitures aux grosses sonos. 

“Je Saigne” prod by WOREK et l’Scream 
Un morceau à double détente : Kofs parle à un fils qu’il n’a pas encore avec les mots que son père lui a transmis. « Ça n’est pas une fiction. Si on écoute bien les paroles, c’est ce que mon père m’a donné comme message et dans le second couplet, c’est ce que moi je vais dire à mon fils. » Le Polonais signe le son, raccord avec le texte, incorporant une guitare céleste trafiquée façon western spaghetti : « On s’est pris la tête sur l’instru, on voulait une sonorité que je ne connaissais pas ». 

“Alicante” prod by NASSEY 
« Je voulais envoyer un titre pour faire bouger les têtes. Quand je dis “En garde à vue on m’a livré du tièb’” (le tiéboudiène est le plat national sénégalais, ndr), ça m’est arrivé plus d’une fois. Quand tu reçois ça, c’est comme du caviar, tu vois la vie autrement ! » Le beat de Nasey cogne avec un kick tressautant qui choque l’auditeur. « On ne va pas donner les adresses mais comme je le dis, viens à Marseille, il y a de la frappe validée ! » 

“Secrétaire” 
Un titre décalé et toxique qui cite The Wire et Breaking Bad. « On a grandi ensemble mais on se serre pas les coudes », c’est la triste réalité décrite par Kofs. « C’est pas très joyeux mais surtout pas très faux. La vie c’est comme ça. L’expression que je déteste, c’est “On est ensemble.” Les 3⁄4 des équipes se déchirent entre elles, les 3⁄4 des associés se fument entre eux… On n’est pas soudés, sinon on n’en serait pas là. » La prod tourne autour d’un piano, un des instruments préférés de Kofs. 

“Caractère” feat SCH
Le seul feat de l’album, et pas n’importe lequel : SCH est en fusion quand il croise son flow avec celui de Kofs. « On devait ramener des prods le S et moi. Quand on est tombés sur celle de 6Lexx Beatz, on a eu la même réaction. Il la voulait direct. Il y avait 40 instrus mais le S a dit “C’est la première, on bouge pas.” On n’a même pas écouté les autres. » Les métaphores sexuelles de SCH se fondent avec les rimes rauques de Kofs. « Le courage, le respect, c’est mieux que les loves. » Le duo est organique, soudé, d’une rare efficacité. 

“Enfin (Outro)”
Une outro qui démarre comme des funérailles. « On a tous des regrets, notamment d’avoir fait souffrir nos parents. Les choses que j’assume pleinement, ce sont les sacrifices que j’ai fait pour en arriver là dans ma musique. » Le team 6Lexx Beatz, principal artisan des sons de “V”, assure avec ce bref final la conclusion d’un album bestial qui n’oublie pas pour autant les sentiments. 

Dernière Sortie

21 févr 2020

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