Mstislav Rostropovich

Nom de naissance

Mstislav Leopoldovitch Rostropovitch

Naissance

27 Mars 1927, Bakou, Azerbaïdjan, Azerbaijan

Biographie

Mistislav Rostropovitch (1927-2007) n'est pas seulement l'un des plus grands violoncellistes de son temps, il est l'un des musiciens et chefs d'orchestres qui ont marqué de leur empreinte la musique du XXème siècle. Cet humaniste qui a eu pour professeurs Chostakovitch et Prokofiev s'est longtemps opposé au régime soviétique avant de s'exiler vers les États-Unis avec sa femme Galina Vichnevskaïa en 1974. Révélé dans son pays à quinze ans, il doit attendre le début des années soixante pour jouer en Europe où il est très tôt considéré comme un maître du violoncelle. Son triomphe au Carnegie Hall et face à l'Orchestre du Bolchoï en 1967 lui apportent une stature internationale. Dix ans plus tard, passé à l'Ouest, il dirige l'Orchestre symphonique de Washington et se produit dans le monde entier, faisant apprécier les symphonies de Chostakovitch, la Symphonie-Concerto de Prokofiev, le Double concerto de Dvorak ou les Sonates pour violoncelle et piano de Beethoven. Mais c'est surtout avec les Suites pour violoncelle de Bach qu'il improvise au pied du Mur de Berlin lors de sa chute en novembre 1989 que « Slava » ou « Rostro » demeure célèbre ; les images font le tour du monde. Honoré de toutes parts, nommé ambassadeur de l'UNESCO, le vieil homme qui réside à Paris retourne à Moscou pour y finir ses jours à l'âge de 86 ans, réconcilié avec son pays.

Comment qualifier Mstislav Leopoldovitch Rostropovitch d'un autre terme que celui de géant de la musique du XXème siècle ? Né le 27 mars 1927 à Bakou, capitale de l'Azerbaïdjan alors intégrée à l'URSS dans une famille aisée, le jeune Rostropovitch prend ses premières leçons de piano à l'âge de quatre ans avec sa mère qui en joue professionnellement. À dix ans, c'est auprès de son père violoncelliste qu'il s'intéresse à son nouvel instrument.

« Slava » le virtuose

Fort de cet apprentissage paternel, il interprète pour la première fois en public le Concerto pour violoncelle n°1 de Saint-Saëns en 1940 et entre au conservatoire de Moscou trois ans plus tard en classes de composition, piano et violoncelle Il a pour professeurs Vissarion Chebaline, Dmitri Chostakovitch et Serguei Prokofiev. Secrétaire de ce dernier pendant quelque temps, il le persuade de reprendre son Concerto pour violoncelle inachevé pour le transformer en Symphonie concertante pour violoncelle et orchestre ; l'opus 125 restera comme une oeuvre majeure du compositeur.

Délaissant ses vélléités de compositeur après avoir entendu la Symphonie n°8 de son maître Chostakovitch, l'adolescent se consacre au violoncelle. Bien lui en prend car après une prestation remarquée en 1942, il remporte les premiers prix des Concours de Prague (1947, 1950) et de Budapest (1949) et le Prix Staline décerné par le gouvernement soviétique en 1950. Sa notoriété grandissante s'étend jusqu'à Florence, en Italie, où il se produit l'année suivante. Dédicataire de la Sonate pour violoncelle opus 119 de Prokofiev, « Slava » (le surnom donné par ses parents) est nommé professeur aux conservatoires de Léningrad (Saint-Pétersbroug) et de Moscou. En 1955, il épouse la chanteuse vedette du Théâtre Bolchoï, Galina Vichnevskaïa avec qui il fera sa vie jusqu'à la fin de ses jours. Le couple se voit refuser une tournée en Europe par le président du Soviet suprême Nikolai Boulganine secrètement amoureux de la chanteuse lyrique avant d'être démis de ses fonctions par Nikita Khroutchev qui rétablit l'autorisation de tourner.

Ascension internationale et exil

Au printemps 1956, Rostropovitch fait ses débuts au Royal Festival Hall à Londres puis au Carnegie Hall à New York. De retour dans son pays, le jeune virtuose est adoubé par Chostakovitch qui lui dédie son premier Concerto pour violoncelle (1959) que Rostropovitch interpréte et enregistre avec le Philadelphia Orchestra dirigé par Eugène Ormandy. Le compositeur lui dédiera également son second concerto en 1966. Lors d'une nouvelle tournée européenne en 1963, Rostropovitch rencontre Benjamin Britten avec qui il se lie d'amitié (le compositeur anglais écrit la partie soprano de son War Requiem pour Galina Vichnevskaïa) ; il interprète la Sonate pour violoncelle, les trois Suites et la Symphonie qui lui sont dédiées. Réciproquement, Britten accompagne au piano Mstislav Rostropovitch sur des enregistrements de Schubert.

Intéressé par la direction d'orchestre, Rostropovitch qui a pris ses premières leçons auprès de Leo Ginzburg commence à diriger Lady McBeth de Mtsensk de Chostakovitch en 1962 puis les transcriptions pour orchestre des Chants et danses de la mort de Moussorgski. En 1967, face à l'Orchestre du Bolchoï, il conduit l'opéra Eugène Onéguine avec sa femme dans le rôle de Tatiana. Le 21 août 1968, Rostropovitch se produit pour la première fois aux BBC Proms avec l'Orchestre symphonique d'URSS pour y jouer le Concerto pour violoncelle de Dvorak ; l'invasion de la Tchécoslovaquie par l'Union soviétique le même jour révolte le musicien qui dédie la Sarabande de la Suite n°2 (BWV 1008) de Bach « à ceux qui sont tristes ». Dès lors, Rostropovitch prend ses distances avec le pouvoir en place et soutient ouvertement l'écrivain opposant Alexandre Soljenitsyne. En 1974, les époux Rostropovitch et Vichnevskaïa (limogée du Théâtre Bolchoï) choisissent de s'exiler avec leurs enfants et s'envolent pour les États-Unis. Ils sont désormais bannis de l'URSS et en 1978 déchus de leur nationalité jusqu'au retournement politique de 1990.

« Rostro » le citoyen américain

Entre 1977 et 1994, Mstislav Rostropovitch prend la direction de l'Orchestre symphonique national basé à Washington et enregistre avec nombre de solistes renommés (Martha Agerich, Sviastoslav Richter, Vladimir Horowitz...). Dans le même temps il se produit régulièrement au festival d'Aldeburgh créé par son ami Benjamin Britten et multiplie les enregistrements. Dédicataire d'une centaine de pièces pour le violoncelle, Rostropovitch milite pour la reconnaissance de l'instrument et suscite un engouement très fort par le festival qu'il crée à son nom. En 1978, il est invité à jouer à la Maison Blanche avec le fameux Stradivarius « Duport » de 1711 dont il a fait l'acquisition. Musicien de stature internationale, « Rostro » est immortalisé par sa performance impromptue lors de la chute du Mur de Berlin en novembre 1990. En 1991, il enregistre pour la première fois les six Suites pour violoncelle seul de J. S. Bach.

Honneurs et enseignement

Reconnu comme citoyen russe malgré sa nationalité américaine, il s'insurge à nouveau contre la main-mise du pouvoir sur les états baltes réclamant leur indépendance. Cependant, en 1993, il manifeste son soutien à Boris Eltsine en donnant un concert sur la Place Rouge. Nommé directeur de l'Académie Kronberg qui organise le Concours international de violoncelle Pablo Casals, Rostropovitch commande l'opéra Lolita au compositeur Rodion Chtchedrine. Entre de multiples honneurs et récompenses, il reçoit la Légion d'honneur, est nommé ambassadeur de l'UNESCO pour le développement de l'apprentissage musical et crée avec son épouse la Fondation Rostropovitch-Vichnevskaïa. En mars 2002 est inauguré dans sa ville natale le musée Rostropovitch tandis que le maître donne des masterclass au conservatoire de l'Azerbaïdjan.

La santé du grand violoncelliste installé à Paris commence à décliner en 2007. Admis dans un hôpital parisien en janvier, Rostropovitch souhaite revenir à Moscou où il est hospitalisé pour un cancer de l'intestin. Il s'éteint à l'Institut Blokhim le 27 avril 2007, un mois après son quatre-vingtième anniversaire fêté par le président Vladimir Poutine. En septembre, l'importante collection d'art du couple promise à la dispersion aux enchères est rachetée par le milliardaire Alicher Ousmanov qui l'offre à l'État pour la création d'un fonds, ouvert au Palais Constantine à Strelna. La veuve de Rostropovitch lui survit jusqu'au 11 décembre 2012 lorsqu'elle s'éteint à l'âge de 86 ans.