Muddy Waters

Nom de naissance

McKinley Morganfield

Naissance

4 Avril 1913, Issaquena County, Mississippi, United States of America

Biographie

Muddy Waters, de son vrai nom McKinley Morganfield, est né le 4 avril 1913 (même si l’artiste prétendait qu’il était né deux ans plus tard) à Rolling Fork, dans l’État du Mississippi. Il est largement reconnu comme l'un des pionniers du blues de Chicago et au-delà, comme une figure du blues américain. Enfant, Muddy Waters est élevé par sa grand-mère, Della Grant, en l’absence de sa mère, décédée peu de temps après sa naissance. C'est Della qui attribua son surnom de « Muddy », car il aimait patauger dans les eaux vaseuses de Deer Creek. Le jeune McKinley Morganfield découvre le blues dans les plantations du Mississippi. Il apprend par lui-même la maîtrise de l’harmonica, puis se met à la guitare, inspiré par des artistes comme Son House et Robert Johnson. Au cours des années 1930, il joue de l’harmonica au côté de Big Joe Williams et se produit régulièrement dans la région du Delta du Mississippi. Mais il se fait évincer, Big Joe Williams lui reprochant de lui voler toutes ses fans de la gente féminine. En 1941, il réalise une session avec Alan Lomax, dans le cadre de son entreprise d’archivage d’enregistrements de bluesmen pour la Library of Congress. En 1943, Muddy Waters déménage à Chicago, où il commence à jouer dans des clubs locaux et se fait rapidement un nom. Son style de jeu distinctif, combinant la guitare électrique avec des éléments traditionnels du blues du Delta, marque une révolution dans le genre. En 1948, il enregistre « I Can't Be Satisfied » et « I Feel Like Going Home », qui deviennent des succès immédiats, publiés sur Aristocrat Records qui deviendra Chess Records. La même année, il publie « Rollin’ Stone », qui devient l’un de ses titres-signature. Les années 1950 et 1960 voient Muddy Waters devenir une figure centrale de la scène musicale de Chicago. Avec son groupe, il enregistre des classiques du blues tels que « Hoochie Coochie Man » (1954), « Mannish Boy » (1955) et « Got My Mojo Working » (1957). Avec « Rollin’ Stone » (dont le nom inspirera le nom du groupe The Rolling Stones), ces trois titres intègreront la liste des 500 chansons qui ont défini le rock’n’roll, établie par le Rock and Roll Hall of Fame. Au cours de sa carrière, Muddy Waters reçoit de nombreuses distinctions, dont six Grammy Awards entre 1972 et 1980. Il continue à enregistrer et à se produire jusqu'à la fin de sa vie, sortant des albums marquants comme Hard Again en 1977, produit par Johnny Winter, qui revitalise sa carrière. Muddy Waters décède le 30 avril 1983 à Westmont, dans l'Illinois, d’une crise cardiaque due aux complications d’un cancer. Il avait 70 ans. 

McKinley Morganfield ne voit pas le jour, comme le prétendent certaines encyclopédies, le 4 avril 1915 à Rolling Fork, mais bien en 1913, et dans le comté d'Issaquena, à proximité de ces eaux boueuses du Mississippi qui lui vaudront son surnom. La confusion entre dates, et lieux, semble avoir été entretenue par le musicien en personne, plus par négligence que par coquetterie. 

Musique et alcool

A la disparition de sa mère, c'est sa grand-mère - Della Grant - qui a en charge son éducation. Il s'initie très précocement au blues rural du Delta, alternant quelques concerts rémunérateurs, avec un plus régulier travail dans les plantations. En 1940, il donne ses premiers concerts à St. Louis (Missouri), puis revient vers ses racines, diriger dans son état d'origine un juke joint , établissement où une audience noire peut boire du mauvais alcool distillé, jouer aux dés ou aux cartes, et écouter de la musique (soit celle d'un juke-box, soit, celle, en live, du patron de la maison).

Muddy Waters croise en 1941 la route de l'ethnomusicologue Alan Lomax, à l'époque mandaté par la Bibliothèque du Congrès pour recueillir des documents sonores dans les comtés ruraux du Sud, considérés comme un conservatoire de la musique des Noirs, héritiers des esclaves africains. Waters enregistre alors deux chansons (puis de nouveaux titres à l'occasion d'une session de 1942), sous influence des bluesmen Son House, patriarche du Delta, et Robert Johnson.

Musique et électricité

Puis, Waters s'installe à Chicago en 1943, où il opte pour une instrumentation électrifié - afin que sa musique se fraie un chemin dans les cris de la foule - , fonde les Chicago Blues (dans lequel il intègre un harmonica, tel celui joué de façon virtuose par Little Walter Jacobs, le pianiste Otis Spann, et celui qui restera un compagnon de longue date, le guitariste Jimmy Rogers), et parvient, après quelques tentatives infructueuses, à convaincre en 1948 le patron de maison de disques Leonard Chess de lui proposer un contrat. « Rollin' Stone » est alors le premier hit instantané du musicien.

Sunnyland Slim lui ouvre ses sessions, puis Big Bill Broonzy, à l'époque figure tutélaire de la scène musicale de la ville, lui offre les premières parties de ses concerts.Muddy Waters devient alors la figure prééminente de la scène naissante du Chicago blues.Une fois dans la place, Waters facilite par la suite l'entrée dans l'écurie Chess d'un certain Chuck Berry.

Musique et voyages

Ses tournées européennes, et en particulier britanniques, ont une influence prépondérante sur une génération d'apprentis rock stars : The Rolling Stones lui empruntent le titre d'une chanson, avant de s'enfoncer dans le tourbillon de l'histoire, et Canned Heat, Foghat, les Allman Brothers Band, ou Cream reprennent ses compositions. Led Zeppelin, moins vertueux et respectueux, s'inspirent très largement dans l'un de leurs premiers succès (« Whole Lotta Love » ) du « You Need Love » composé par Willie Dixon pour Waters (le compositeur et contrebassiste joue un rôle déterminant quant au répertoire du chef d'orchestre). Et la filiation est claire entre le « You Shook Me All Night Long » d'AC/DC et le « You Shook Me » de Waters.

Toutefois, l'usage systématique d'intervalles irréguliers, et très réduits, dans la musique de Waters, la rend particulièrement délicate à dupliquer. Ce dernier n'en accumule pas moins les hits : « Mannish Boy » , « I've Got My Mojo Working »... entretenant une rivalité de bon aloi avec d'autres vedettes de Chess Records (tel Howlin' Wolf).

En 1954, alors qu'il est au faîte de sa carrière, Waters déplore le départ de Little Walter et de Spann (mais le premier reste un compagnon de sessions tout au long de la carrière du guitariste), et se tourne alors vers l'Europe : les fans de blues, très respectueux de l'idiome, y sont bouleversés par la musique, violente et survitaminée, proposée par Waters. A telle enseigne que certains critiques, effrayés par le volume sonore, s'enferment dans les toilettes, loin du brouhaha, pour rédiger leur compte-rendu. Cette période paradoxale voit donc les musiciens noirs américains tourner le dos à une certaine tradition du blues rural et acoustique, et les critiques et audiences blancs s'y raccrocher frénétiquement.

En 1968, l'album Electric Mud offre une stupéfiante version du « Let's Spend the Night Together » des Rolling Stones, involontaire pied de nez à la cohorte de musiciens blancs qui se sont inspirés de lui. En 1969, il enregistre un très pépère Fathers and Sons en compagnie de l'harmoniciste Paul Butterfield, et du guitariste Mike Bloomfield.

Musique et fans

Sa baisse de popularité durant les années soixante-dix (en fait commune à toute une génération de bluesmen), sera contrecarrée par l'action militante d'un fan de la première heure, le guitariste, texan et albinos, Johnny Winter, qui lui permettra d'enregistrer de nouveau (quatre albums brillants, retrouvant la fièvre de l'âge d'or de Chicago). De plus, les London Muddy Waters Sessions (1972), sont l'occasion pour des bluesmen au teint pâle (Stevie Winwood, Rory Gallagher) de payer leur tribut à l'histoire.

En 1976, l'homme de Chicago est invité à participer à The Last Waltz (film de Martin Scorsese, qui utilisera à maintes reprises les chansons de Waters dans ses films), dernier concert de The Band. En 1977, Muddy Waters se voit gratifié d'un Grammy Award pour l'album Hard Again . Cet enregistrement, célébrant un retour en fanfare, est suivi en 1978 de I'm Ready , puis de King Bee (1981).

Mais sa santé déclinante lui impose de se retirer progressivement de la scène : il donne son dernier concert à l'automne 1982, en Floride, et en compagnie d'Eric Clapton. Muddy Waters est décédé dans son sommeil le 30 avril 1983, à Westmont (dans l'Illinois). Il était âgé de soixante-dix ans. Il est inhumé au cimetière de Restvale, à Alsip, près de ce Chicago dont il a tant participé à la renommée. Une rue de la Cité des Vents porte son nom. Deux de ses enfants (Big Bill Morganfield et Larry « Muddy Junior » Williams) ont mené carrière en tant que chanteurs de blues.